Début du XXe siècle, Arthur Schnitzler écrit La Ronde, texte extraordinaire de couples enchaînés les uns aux autres, œuvre qui fera scandale, en raison de la thématique sexuelle… ou de la judaïté de l’auteur. Fermeture autour de la figure du duo, et ouverture infinie de la chaîne qui déplace les corps, les transperce. Schnitzler dit crûment amour et sexe des personnages sociaux. Il invente un protocole du désir perméable, passé et transmis à l’autre, parfois dans la tension, dans l’absence de concordance. La dramaturgie de ce livre est déjà une danse où les couples jamais ne se referment mais toujours rencontrent l’autre. J’ai imaginé une chaîne infinie de duos dansants, chantants, parlants. Les corps bougent, se heurtent, s’embrassent, se quittent et pourtant restent, se lient dans l’espace mental, s’ancrent pour maintenir une continuité du vivant et du désir. J’imagine une série de couples enchâssés, un paysage de duos avec des artistes hors-normes, qui se suspendent au temps pour entretenir ce foyer plusieurs heures durant dans un doux et long embrasement chorégraphique.